Les femmes du Bénin, piliers des célébrations vaudou

Vêtue de blanc et de rose, Deborah Bossou, 25 ans, mélange chants vibrants et danse alors qu’elle s’immerge avec ses compagnons de pratique du vaudou, les célébrations traditionnelles du vaudou au Bénin.
Ce week-end a eu lieu le festival annuel traditionnel des Vodun Days, qui englobe les arts, la culture et la spiritualité vaudou, dans la ville méridionale de Ouidah, au centre du couvent religieux de Sakpata Zoungbodji.
« Cette religion, cette culture — le vaudou — occupe une place centrale dans ma vie. C’est pour cela qu’il était important pour moi d’être ici », explique la jeune femme souriante qui a accessoirisé sa barbe de festival d’un long collier de perles blanches et de bracelets assortis.
Les femmes jouent un rôle central dans cette célébration festive de trois jours qui atteignait son apogée samedi soir. Ils sont placés dans le rôle de gardiens de la transmission spirituelle et de la préparation des rituels du vaudou, un rite animiste fondé sur les pouvoirs de la nature et les liens avec les ancêtres. Les rituels des Journées Vodun rassemblent des milliers de personnes venues de tous les coins du monde à Ouidah, berceau du vaudou.
– ‘Secrets’ –
« Sans les femmes, présentes au premier plan comme dans les coulisses, il n’y aurait pas de Journées du Vodun, ni de vaudou. Elles sont des piliers essentiels » des festivités, a déclaré à l’AFP Dah Adoko Gbediga, présidente de l’Union des associations et organisations des religions endogènes du Bénin (UAOREB).
« On peut le comprendre simplement en observant ce qui se passe en ce moment autour de nous », explique Gbediga, 68 ans, confortablement installé dans son fauteuil du temple des Pythons, où se sont rassemblés des dizaines de fidèles vaudous. Selon la légende, les pythons protégeaient Ouidah des agressions extérieures.
Les touristes se rassemblent pour admirer des dizaines de pratiquants vaudous qui entrent en transe pour incarner Thron Kpeto Deka, une présence divine représentant le bonheur parfait et la richesse. D’autres dansent au rythme des tambours joués par des hommes.
« Ce sont principalement les femmes qui choisissent les vêtements que nous porterons pour ce genre d’événement », a déclaré Gbediga. « Elles jouent un grand rôle dans l’organisation des rites, notamment parce qu’elles sont chargées d’enseigner et de transmettre le savoir vaudou dans les couvents aux petits et aux grands. »
Selon le ministre béninois de la Culture, Jean-Michel Abimbola, les missions confiées aux femmes pour l’organisation des rites vaudous sont « nombreuses et importantes ». Mais la nature exacte de certaines d’entre elles ne peut être révélée en raison des règles de secret qui entourent ces rituels.
« Il y a des secrets que seules les personnes initiées comme moi connaissent. Mais je peux dire que les femmes ont une place centrale dans le vaudou », a déclaré à l’AFP Mme Abimbola, alors que les festivités s’accéléraient.
Pour être initié, il est préférable de s’adresser aux chefs des adeptes, qui participent en grand nombre aux Journées vaudou et qui se distinguent dans la foule avec leurs foulards blancs.
« Nous pouvons remercier les divinités pour ceux qui ne le peuvent pas, et nous sommes aussi des intermédiaires entre les adeptes et les chefs vaudous », explique l’une d’entre elles, Tassi Kpomegan Gabrielle, 70 ans.
– Divinités féminines –
Certaines célébrations du festival sont dédiées spécifiquement à des divinités féminines telles que Mami Watta et Sakpata, soulignant l’importance du rôle des femmes à la fois dans le vaudou et dans l’imaginaire culturel collectif.
Certaines de celles dédiées à Mami Watta, divinité aquatique représentant une mère nourricière et le pouvoir destructeur de l’océan, ont attiré des centaines de personnes sur la plage de Ouidah.
Pour la dignitaire locale Suzanne Celeste Delaunay Belleville, il ne fait aucun doute quant à l’importance des femmes et de leurs divinités féminines dans le rituel vaudou.
« Les femmes sont présentes à toutes les étapes. Au début, au milieu et à la fin. Même dans les rites réservés aux hommes, les femmes sont toujours là », explique-t-elle. Cela dit, elle déplore un manque de représentation des femmes au sein des hautes autorités vaudou. Citant quelques dignitaires féminines de haut rang, elle déplore que « beaucoup d’entre elles ont été élevées dans l’ombre et c’est quelque chose sur lequel nous devons encore travailler ».
AFP