Guinée-Bissau – Candidature d’Umaro Sissoco Embaló : quand le pouvoir reste le maitre du jeu

Guinée-Bissau – Candidature d’Umaro Sissoco Embaló : quand le pouvoir reste le maitre du jeu
Spread the love

Le président de la Guinée-Bissau, Umaro Sissoco Embaló, a surpris de nombreux observateurs politiques en annonçant, cette semaine, sa décision de se porter candidat à la présidentielle de 2025, alors qu’en septembre 2024, il avait publiquement déclaré qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat. Ce retournement de situation intervient dans un contexte de tensions politiques croissantes et de débats sur l’avenir du pays, qui a connu plusieurs transitions de pouvoir tumultueuses ces dernières années.

« Ces derniers jours, je revenais de voyage », avait-il expliqué au micro de RFI le 11 septembre 2024. « Dans l’avion mon épouse m’interpelle : « Monsieur le Président, je crois que tu ne dois pas te présenter à la prochaine présidentielle. » Surpris, je lui demande pourquoi ? « Parce que tu ne mérites pas qu’on t’insulte autant. » Après avoir mûrement réfléchi, le lendemain, je lui réponds ceci : « Vous avez raison, j’ai entendu vos conseils, je ne serai pas candidat en 2025 »,  parce que je ne veux pas me rabaisser au même niveau que ceux qui m’insultent », avait-il expliqué il y a moins de six mois seulement.

Cette déclaration avait été perçue comme un signe de volonté de favoriser le renouvellement politique et d’ouvrir la voie à un autre leader pour succéder à son administration et, ainsi, tenter d’apaiser les tensions politiques dans ce petit pays d’Afrique de l’ouest. Cependant, de retour à Bissau après une série de visites officielles, dont Moscou et Paris, le président Embalo est à peine sorti de l’avion qu’il indique déjà sa candidature et sa victoire dès le premier tour.

Le Président assume également être à l’origine du départ précipité de la délégation de la Cédéao, en mission à Bissau la semaine dernière : « Ils n’ont pas respecté la feuille de route. Ici, ce n’est pas une république bananière. Il y a un président, il y a une loi, il y a une Constitution. Et la Cour suprême, on ne se badine pas avec ça. »

Sa décision de se présenter à la présidentielle n’est pas contre la constitution du pays puisqu’il lui reste un mandat à faire. Cependant, cela laisse un grand point noir sur sa crédibilité en tant que personnalité publique.

La Guinée-Bissau : un pays fragile

La Guinée-Bissau, petit pays d’Afrique de l’Ouest, est depuis longtemps confrontée à des défis institutionnels et politiques majeurs. Le pays a connu une série de coups d’État et d’instabilité gouvernementale, rendant difficile le développement durable et l’établissement de gouvernements démocratiquement élus qui puissent durer. Le mandat d’Umaro Sissoco Embaló a été marqué par une tentative de réformes ambitieuses, notamment dans le secteur de la gouvernance et de la lutte contre la corruption, mais aussi par des tensions politiques internes, notamment avec l’opposition et au sein de l’Assemblée nationale qui est depuis, dissoute.

Le fait qu’Embaló renonce à sa promesse de ne pas briguer un nouveau mandat pourrait exacerber les clivages déjà existants, particulièrement en période électorale. Il reste à savoir si son retour dans la course présidentielle mettra fin aux incertitudes ou au contraire amplifie les divisions.

Une élection présidentielle décisive

Les élections présidentielles de 2025 en Guinée-Bissau s’annoncent donc cruciales pour l’avenir politique du pays. Elles pourraient marquer un tournant dans la consolidation de la démocratie ou, au contraire, faire resurgir des tensions profondes entre les différents camps politiques.

Les partis d’opposition se préparent à cette échéance avec des stratégies divergentes, et plusieurs figures de proue politiques se positionnent déjà pour défier le président sortant. Le processus électoral sera également surveillé de près par la communauté internationale, qui suit avec attention les progrès démocratiques en Guinée-Bissau.

En attendant, Umaro Sissoco Embaló devra faire face à un double défi : convaincre la population de sa légitimité à poursuivre son mandat tout en maintenant la stabilité dans un contexte tendu. Une chose est certaine : la Guinée-Bissau se dirige vers une élection présidentielle qui pourrait être aussi décisive que l’issue d’un pari politique audacieux.

Jens McKenzy

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *