Bénin – Loi sur la chefferie traditionnelle: Sa Majesté DJOMAMOUSSO salue la réforme

Invité de l’émission Expression Directe sur GERDDES Afrique 89.5 FM ce dimanche 6 avril, Sa Majesté DJOMAMOUSSO, chercheur en ésotérisme et figure emblématique des royautés endogènes, s’est prononcé sans détour sur la nouvelle loi votée par le Parlement béninois encadrant la chefferie traditionnelle. Une réforme qu’il salue, mais dont il dénonce les limites, les non-dits et les risques de dérives à venir.
Pendant 90 minutes d’échanges nourris avec le journaliste Laurent AGBOTOUYEDO, Sa Majesté DJOMAMOUSSO a structuré son intervention autour de plusieurs axes majeurs. Il a d’emblée salué la démarche du chef de l’État Patrice Talon, qui à travers cette réforme, vient poser un cadre juridique à l’existence de la chefferie traditionnelle, longtemps tolérée mais juridiquement floue.
Pour lui, cette loi a le mérite de constitutionnaliser cette institution pluriséculaire et de la reconnaître comme garante des us, coutumes et identités locales. Cependant, Sa Majesté a tenu à tempérer les enthousiasmes précipités. Il rappelle que la loi, bien que votée par les députés le 13 mars dernier, n’est pas encore promulguée. « Il ne faut pas crier victoire trop tôt », affirme-t-il. Une loi non promulguée n’a aucune force exécutoire. Mieux encore, une loi promulguée reste perfectible : elle peut et doit évoluer en fonction des réalités du terrain.
L’une des critiques majeures émises par l’invité concerne le manque de fondement historique et coutumier solide du texte. Selon lui, la réforme aurait dû s’appuyer sur deux piliers incontournables : un code royal de succession et un code royal coutumier. Leur absence fragilise la portée de la loi, qui risque ainsi d’institutionnaliser des conflits plutôt que de les prévenir.
« Une véritable réforme de la chefferie traditionnelle doit dépasser les considérations administratives et inclure une profonde réflexion sur les fondements anthropologiques et symboliques du pouvoir traditionnel », a-t-il déclaré.
Pour lui, le travail effectué par la commission parlementaire, bien qu’important, reste incomplet. Il appelle à une réouverture du processus, cette fois-ci en impliquant pleinement les gardiens des traditions, les chercheurs en sciences sociales et les représentants des royaumes.
Autre point d’achoppement : la classification des chefferies prévue dans la loi. Pour Sa Majesté DJOMAMOUSSO, cette hiérarchisation ne repose sur aucun socle historique ou culturel. Elle serait plutôt l’expression d’une volonté politique centralisée, dictée par une logique administrative étrangère aux réalités du terrain.
Il déplore une approche top-down, dans laquelle les voix des chefferies elles-mêmes ont été peu entendues, voire ignorées. Cette absence de concertation active pourrait, à ses yeux, miner la légitimité du texte et engendrer une contestation silencieuse mais profonde.
Des risques de tensions invisibles et une stigmatisation inquiétante
Abordant les réactions timides que suscite la loi, Sa Majesté met en garde contre une lecture trop rapide de ce calme apparent. « L’absence de contestation ne signifie pas absence de guerre », avertit-il. Selon lui, les chefferies disposent de réseaux de résistance invisibles, parfois occultes, qui peuvent se réactiver face à une imposition étatique jugée injuste ou illégitime. Il évoque également le risque de stigmatisation que pourrait engendrer l’usage de certaines terminologies contenues dans la loi.
Les mots choisis pour désigner les catégories de chefferies sont, selon lui, porteurs de jugements de valeur, susceptibles de nourrir des frustrations identitaires durables. Face à ces nombreux points d’ombre, Sa Majesté DJOMAMOUSSO propose une démarche constructive : la vulgarisation nationale de la loi. Il exhorte le gouvernement à organiser des campagnes d’information, de débats publics et de concertation avec les communautés royales, afin de recueillir les aspirations réelles des acteurs concernés.
Pour lui, cette loi n’est qu’un ballon d’essai. Elle mérite d’être discutée, améliorée, adaptée. Car une réforme aussi sensible ne peut réussir que si elle s’inscrit dans une dynamique inclusive, respectueuse des héritages pluriels du pays.
Somme toute, l’intervention de Sa Majesté DJOMAMOUSSO sur Expression Directe aura permis de mettre en lumière les enjeux profonds que soulève la loi sur la chefferie traditionnelle au Bénin. S’il en salue la portée historique, il en interroge aussi la méthode, les lacunes et les intentions. Une prise de parole lucide, ferme et éclairée, qui appelle à une vigilance citoyenne et à un dialogue permanent entre tradition et modernité.
Stéphane AHINOUHOSSOU